CONTRE LE COMPROMIS DANS LA CRÉATION
Je discute aujourd’hui avec un de mes éditeurs au sujet de la couverture d’une réédition. Le premier projet me paraît excellent mais, me dit-il, il a été refusé par le comité éditorial.
Il me montre les autres couvertures, que je trouve moins bonnes, mais que le comité a acceptées.
Les comités aboutissent bien souvent à produire du compromis. Un peu de ceci, un peu de cela : au final, personne n’est vraiment content, personne n’a vraiment ce qu’il veut, mais les moyennes de chacun sont atteintes.
Dans les industries créatives, la technique du compromis devrait être interdite pour les raisons suivantes :
1.- Le compromis a généralement pour effet de brouiller l’identité d’un produit, en éliminant par exemple ses caractéristiques trop singulières pour les ramener à du connu, et parfois de l’archi-connu. Ce sont au contraire les singularités qui créent l’attachement d’une partie du public, qui en deviendra l’évangélisateur;
2.- L’évangile du compromis repose sur l’idée que se fait l’entreprise du goût du public que les panelistes tentent de prévoir. Pourquoi ne pas lui demander directement son avis ? Ceci suppose évidemment un travail préparatoire important : réunir le public auquel on s’adresse, et non pas le public en général;
3.- Le compromis ne génère aucune énergie. Puisqu’il est l’enfant de tous, il ne l’est de personne. Le succès provient au contraire, en général, d’une idée individuelle pour laquelle se bat une personne. Car c’est l’énergie qui convainc. Dans les industries créatives, si personne ne se bat, c’est la fin de tous. S’il n’y a pas de foi, il n’y a pas d’évangélistes.
Mais seulement des vendeurs.